(MAGUIRE & EATON) Panne, hein quoi?

Il y a des jours qui semblent incompréhensibles. La plupart du temps, vous parvenez à y trouver une explication, mais d’autres fois, vous avez beau vous creuser la tête que vous ne trouvez cependant pas ce qui cloche. C’était le cas du jeune Amadeo Eaton. Il venait de faire presque trois cent kilomètres avec sa voiture sans encombre, et alors qu’il s’approchait de chez lui, le drame. La voiture s’arrêta brusquement. Il ne comprenait pas puisqu’il avait fait le plein avant de revenir de Manchester, où il était allé pour la journée, rendre visite à cette agréable vieille dame qui avait tenu l’orphelinat où il avait passé cinq années de sa vie, et qui avait fait en sorte de le sortir de là, en le proposant à la famille Eaton. C’était l’occasion pour lui de retourner dans la ville de son enfance, et surtout de montrer qu’il était reconnaissant. Des paroles plein la tête, en vue de ce qu’elle lui avait dit, la voiture lui posait maintenant problème. Qu’est ce qu’elle avait cette stupide voiture ? Elle avait pourtant eu sa dose en litres, elle n’avait jamais eu de problèmes auparavant, c’était la tuile. Il sortit de sa voiture, étant en plein milieu d’une rue, il ne pouvait se permettre de gêner la circulation. Il s’excusa auprès du gros monsieur en camionnette qui s’impatientait derrière – il avait qu’à savoir doubler plutôt que de s’engraisser – et tout menu, mais avec force, il poussa sa voiture. Seulement tout seul, c’était un peu la galère, alors à chaque fois, il s’empressait de pousser quelques mètres, puis de tourner le volant pour placer les roues, afin de la caler dans un coin pour ne pas gêner.

Il pestait, il n’avait jamais de chance. Il y avait toujours quelque chose qui allait de travers. La dernière fois, alors qu’il était au pub, un couillon lui avait renversé son verre dessus, en donnant un coup dedans. Et voilà comment se balader avec un jean mouillé, les gens se moquant au passage, pensant qu’il était un petit garçon incontinent. La honte ne tuait pas. Le ridicule non plus. Amadeo ayant fini de pester en admirant sous le capot de sa petite voiture, mettant les mains dans le cambouis, leva les yeux. Un panneau attira son attention : il se trouvait dans Chad Road. Quelle chance ! Finalement il n’était pas si poissard que ce qu’il pensait. Pourquoi ses yeux s’illuminèrent d’un coup ? Il se trouvait dans la rue de son grand ami, celui avec qui il ne manquait aucun match de Birmingham, celui avec qui la bière coulait à flot, Tom Maguire. Ce type pourtant bien plus âgé que lui, incarnait la classe d’un grand-frère qu’Amadeo n’avait jamais eu. Et un sourire apparut sur les lèvres fines. Il ferma sa voiture. D’un coup de clés, et hop il s’élança vers la maison de son ami, qui portait le numéro 007. Il allait finir par se prendre pour Sean Connery, et d’ailleurs en faire des tas, ou bien se prendre pour Pierce Brosnan et se taper le plus de filles qu’il trouverait dans l’entourage, et qu’il appellerait James Bond Girls. Il s’égarait là… Les pensées du jeune Eaton ne sont pas toujours des plus droites. Les mains dans les poches, il avança d’un pas enjoué, et il leva une de ses mains de sa poche pour appuyer sur la sonnette. C’était le genre de trucs qu’il adorait faire, allez savoir pourquoi. Il se plaisait à appuyer des tonnes de fois dessus pour que son interlocuteur arrive en s’énervant. Le problème c’est que parfois ça arrivait, et il se faisait gueuler dessus comme un tout petit enfant.

Il entendit le bruit léger de la sonnette, telle une petite clochette tintant à Noël en pleine nuit, et il attendit que son vieil ami vienne lui ouvrir. Il y avait encore un problème. Il n’avait aucune bière à la main. C’était malin… Il espérait que le frigo de son supporter favori soit aussi rempli que le gosier d’un obèse. Qu’est ce qu’il foutait ? Il était bien long ! Levant les yeux au ciel, il se mit à tambouriner à la porte en appelant :

« TOM ! HEY SEXY TEACHER ! C’est pas l’heure de te retrouver dans tes draps ! Mets toi un caleçon par contre avant de m’ouvrir… »

[C'est pas très gros désolé! silent

]

Putain, qu'est-ce que tu fous là, à cette heure-là ?! En plus, tu me déranges dans mon observation de la voisine d'à côté. Tu verrais ses seins, des ballons, des obus.

PS : Désolé, c'est pourri !

C’était la première fois qu’Amadeo se rendait chez son ami alors qu’il n’avait pas prévu d’y aller, c'est-à-dire que c’était la première fois qu’il ne s’y rendait pas pour un match. Ils partageaient quelques trucs, mais il était vrai que le jeune Eaton ignorait quasiment tout de la vie que menait le professeur. Il se doutait bien que sa vie était assez paisible, un fonctionnaire ça ne travaillait que lors des périodes scolaires, vive les vacances ! Comment son ami le prendrait ? Surement bien, débarquer à l’improviste ça ne tuait personne. Mais il se trompait grossièrement. Après avoir sonné avec insistance, son pote débarqua en caleçon, apparemment dérangé. Ouais il était en train de faire ce qu’Amadeo faisait habituellement avec ses voisines, un peu comme tout le monde quoi. Il matait à la fenêtre d’à côté. Mais espiègle, le petit lutin anglais arbora un large sourire soudainement, comme si les mots de Tom le satisfaisaient, et en poussant carrément son ami professeur de chez lui, il rentra se précipitant dans la chambre de ce dernier :

« Fallait le dire plus tôt ! T’aurais pu m’inviter pour ça ! »

Il ne prenait même pas la peine de raconter pourquoi il était ici. Il s’en fichait, il le raconterait plus tard, ce n’était pas si important que ça. D’ailleurs se souvenait-il du pourquoi il était ici ? Oui, mais sans plus, il le dirait tout à l’heure autour d’une bière. Place à la jeune femme qui sortait de la douche. D’ailleurs, il arrivait pile au bon moment, il en était ravi. Il tendit la main au professeur pour qu’il lui passe ses jumelles, et émerveillé comme si il avait vu un ange, il s’exprima :

« Wow t’as vu ça ? C’est passionnant ! C’est plus des obus ce sont des planètes ! »

Il s’arrêta de parler un moment, laissant sa bouche béate – il n’avait jamais vu une femme ou quoi ? D’ailleurs celle-ci ne se préoccupait pas de la fenêtre, on aurait dit qu’elle faisait exprès d’être légèrement provocante. Il renchérit :

« Wow Tom…Merci pour ce fantastique cadeau. C’est encore mieux que de regarder un match… Tu crois que je peux me la faire ? »

Il s’y voyait déjà en haut de l’affiche… Tom n’avait pas l’air prêteur, et pourtant il était là derrière lui. Voilà que la jeune femme se rhabillait.

« Oh non le spectacle est déjà fini ? C’était court ! »

Il se retourna vers son ami, il était temps de lui expliquer pourquoi il était là. Alors il le regarda en souriant tel un gamin qui vient de faire une connerie, et il dit :

« En fait, je suis là pas parce que tu m’as invité à voir cette charmante demoiselle aux melons, mais plutôt parce que ma voiture est tombée en panne pile dans ta rue ! Une chance non ? A part mater, tu faisais quoi ? T’as de la bière je suppose ? »

Amadeo était vite insupportable, il n’avait pas eu d’enfance, il se comportait donc comme un gamin. C’était d’ailleurs le manque de maturité, qui énervait tant les gens de son entourage, mais ça le rendait aussi extrêmement attachant.

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